Là où tout commence : Les blessures invisibles de la naissance
- Heather Louise

- 16 juin
- 14 min de lecture
Dernière mise à jour : 20 juin
Entre les moustiques qui grésillent dans l’ombre, les oiseaux qui chantent encore en pleine nuit et cette chaleur dense qui monte du sol comme d’un ventre ancien... Je suis assise, jambes croisées, à écouter Alice. Le bruit des vagues au loin berce notre échange. Dans cette atmosphère presque liquide, hors du temps, elle me parle des naissances. Pas celles des hôpitaux, mais celles qui suivent le rythme du souffle, des mains qui soutiennent, du silence des femmes qui savent. Je l’écoute. Et en même temps, je sens en moi la thérapeute s’éveiller. Celle qui, depuis plus de vingt ans, accueille dans ses mains les corps qui se souviennent sans mots.
Alice est sage-femme. Formée au Mexique auprès de celles qu’on appelle parteras, elle a aussi accompagné des femmes en France, en tant que doula. Elle m’ouvre les portes d’un monde que je porte depuis longtemps, un monde que je reconnais intimement dans mon travail thérapeutique. Elle cite abondamment les travaux du médecin et obstétricien Michel Odent, qui a montré combien la manière dont un enfant vient au monde laisse une empreinte durable. Non seulement sur son système nerveux, mais aussi sur sa capacité à aimer, à se sentir en sécurité, à faire confiance au lien.
En l’écoutant, un savoir ancien s’est réactivé en moi avec une clarté nouvelle. J’ai toujours senti que la façon dont on arrive au monde imprime une trace, pas seulement dans le corps, mais aussi dans la respiration, le rapport à l’intimité, à la régulation émotionnelle. En tant qu’ostéopathe et thérapeute du trauma, je perçois chaque jour dans les tissus ce que le mental n’a pas pu dire. Des empreintes précoces qui influencent toute une vie de relation. Ce que m’a transmis Alice, c’est un éclairage plus précis sur la manière dont ces tout premiers instants façonnent notre rapport à la sécurité, au contact, à la présence. Cela vient toucher le cœur même de ma pratique : restaurer les bases primitives de confiance.

QUAND L’HÔPITAL REMPLACE LE CERCLE DES FEMMES
Avant l’ère de la médecine hospitalière, les naissances se déroulaient dans des contextes chaleureux, humains, accompagnées de femmes expérimentées. Aujourd’hui, beaucoup de bébés arrivent dans des environnements stériles, très lumineux, parfois bruyants, où la mère est allongée, sous perfusion, souvent dans un grand isolement. Ce cadre, bien que sécurisant d’un point de vue médical, peut générer beaucoup d’anxiété. Le taux de cortisol maternel, c’est-à-dire l’hormone du stress, augmente significativement, et le bébé le perçoit directement par le biais du placenta. Son système nerveux s’imprègne alors d’un signal de danger. Dans plusieurs cultures qui ont su préserver le savoir des naissances, comme chez certains peuples autochtones, on continue à accueillir l’enfant dans un espace calme, rituel, soutenu par la présence bienveillante des femmes.
LA PÉRIDURALE
La péridurale apaise la douleur, mais elle apaise tout. Elle endort. Elle coupe. Elle ralentit ce dialogue instinctif, archaïque, entre le corps de la mère et celui de l’enfant. Ce qui soulage la mère traverse aussi le placenta et peut engourdir le bébé. La dose d’anesthésiant est calibrée pour un adulte de soixante à quatre-vingts kilos. Le bébé, lui, pèse à peine quelques kilos. Il reçoit une charge neurochimique disproportionnée, bien au-delà de ce que son système encore en formation peut intégrer. À la naissance, cela se manifeste parfois par un tonus faible, une succion difficile à initier, un regard absent, un manque de réactivité au contact. Le bébé est là… mais comme à distance. On parle alors de dissociation néonatale. Plus tard, cela peut s’installer comme un mode de vie. Une difficulté à habiter son corps. À ressentir pleinement. À rester là, au cœur de l’expérience. Comme si le système nerveux s’était adapté en choisissant la veille permanente, l’engourdissement comme refuge. Je reconnais cette empreinte chez plusieurs de mes patients : une forme d’hypervigilance douce, comme si le corps flottait à la surface de lui-même, dans une sécurité artificielle, sans jamais oser s’enraciner. Leur système nerveux, privé dès le départ d’une pleine activation, a appris à survivre dans la demi-mesure, en hypo-présence.
LA CÉSARIENNE
Naître par césarienne, c’est arriver sans traversée. Le corps du bébé ne descend pas dans le bassin, ne sent pas les parois vivantes du canal vaginal se refermer autour de lui, ne reçoit pas la poussée rythmée de l’utérus. Il est extrait. Ce passage évité, c’est aussi un manque de compression naturelle des poumons, cette pression qui aide à expulser le liquide amniotique et prépare la première respiration. C’est l’absence de stimulation du nerf vague, si essentiel à la régulation du système nerveux et au sentiment de sécurité intérieure. C’est aussi la perte du contact avec la flore vaginale transmis au moment du passage, qui vient ensemencer les fondations de l’immunité. Quand ce rituel corporel n’a pas eu lieu, l’ancrage peut être plus difficile. Certains bébés ont du mal à respirer profondément, à tonifier leur corps, ou à s’incarner pleinement dans l’instant. Plus tard, cela peut se traduire par une difficulté à traverser les épreuves, à s’engager dans les transformations, ou à sentir qu’ils ont vraiment "pris part" à leur propre vie. J’ai vu chez certaines personnes nées par césarienne une forme de contournement récurrent : elles évitent l’intensité, se retirent des passages serrés, peinent à sentir leur propre force dans les moments de bascule comme si leur corps n’avait jamais été initié à la traversée. Et chez d’autres, au contraire, j’ai observé une quête effrénée d’intensité. Ces personnes cherchent le feu, le choc, l’extrême, comme pour forcer un passage qu’elles n’ont jamais vécu. Elles courent après le seuil, attirées par les initiations, les montées d’adrénaline, les expériences radicales… mais sans toujours pouvoir les intégrer. C’est une tentative de compenser une dissociation primaire. Un appel du corps à revivre ce qui n’a pas été vécu.
LA CÉSARIENNE PROGRAMMÉE
Très répandue dans les pays anglo-saxons, elle résonne avec les traumas liés aux déclenchements, mais avec une intensité supplémentaire : l’absence totale de passage par le col, l’extraction hors du temps, et une anesthésie plus importante. L’enfant est littéralement arraché au ventre de sa mère, sans signal préalable, sans impulsion intérieure.
Alice me racontait que, selon les sages-femmes mexicaines, « les femmes blanches n’arrivent plus à accoucher parce qu’elles passent leur vie assises ! » Et de fait, notre mode de vie moderne a profondément modifié la physiologie de l’accouchement. Le corps humain est fait pour bouger. Dans de nombreuses cultures où la marche, le portage et les travaux manuels font encore partie du quotidien, le bassin reste mobile tout au long de la grossesse. Il s’adapte aux mouvements, suit le rythme du bébé, s’assouplit. Grâce aux hormones (en particulier la relaxine) les ligaments jouent leur rôle : ils préparent le passage. Mais dans nos sociétés sédentaires, le bassin se rigidifie, les tissus perdent en élasticité, et il arrive que la tête du bébé soit trop volumineuse, ou mal positionnée, pour passer naturellement. Ce manque de mobilité peut mener à des accouchements plus difficiles, voire à des indications de césarienne.
Ce que l’on présente alors comme une solution médicale rapide est parfois le résultat d’un long éloignement du corps, du mouvement, du rythme naturel. Or la naissance est un passage. Elle a besoin de temps, de gravité, de verticalité, de confiance. Sans cela, nous risquons d’arracher les enfants à la vie avant qu’ils ne s’y soient eux-mêmes engagés.
LA CÉSARIENNE D’URGENCE ET L’ANESTHÉSIE GÉNÉRALE
Il arrive que la naissance se transforme en urgence vitale. Dans ces cas, la césarienne sous anesthésie générale devient un acte salvateur. Elle sauve la mère et sauve le bébé. Mais elle peut aussi laisser des empreintes profondes.
Lorsque la mère est complètement endormie, comme « absente » de la naissance, l’enfant naît dans un monde sans regard, sans voix, sans contact maternel. Il n’y a pas de point d’ancrage, pas de visage familier. Le bébé arrive dans un espace froid, parfois brutal, sans la continuité affective de celle qui l’a porté. Pour certains, c’est comme naître dans la mort. Et en effet, ce type de naissance peut raviver, de manière inconsciente, des mémoires transgénérationnelles : femmes mortes en couches, lignées fauchées dans la transmission de la vie. L’enfant naît dans un récit où la survie prend le pas sur la présence.
Voici le témoignage de Laurence, née alors que sa mère était sous anesthésie générale, et devenue elle-même mère de quatre enfants, tous nés par césarienne, dont deux par césarienne d’urgence :
« Personnellement, cela m’a fait revivre des mémoires de mère morte en couches et cela a créé une angoisse très vive de rester coincée dans cette « situation sans issue » et ce sentiment de devoir m’en sortir toute seule qui a conditionné pas mal de schémas de fonctionnement dans ma vie. »
Mais là encore, la mémoire peut être revisitée. Par des approches douces, qui tiennent compte de l’état d’hypervigilance du système nerveux, il est possible de restaurer un sentiment de sécurité et d’accueil. De recréer un point d’entrée conscient dans l’existence. Et c’est à partir de ce point d’entrée que l’on peut commencer à soigner, non seulement pour soi-même, mais aussi pour sa mère, qui a vécu un immense traumatisme… et, par-delà, envoyer de la lumière aux femmes et aux bébés disparus dans nos lignées, et de libérer les générations à venir.
LE DÉCLENCHEMENT
Je devais naître un dimanche. Mais le médecin, pour son confort, a préféré provoquer l’accouchement le vendredi, juste avant le week-end. Ma mère, courageuse, a refusé la péridurale. Mais elle a reçu une perfusion d’ocytocine synthétique pour déclencher le travail. Et c’est là que tout s’est inscrit. Mon système, encore à l’abri, a été submergé d’une hormone puissante, sans le contexte de sécurité qui devrait l’accompagner. L’ocytocine est censée relier, envelopper, ouvrir au lien. Mais dans mon cas, elle a annoncé la rupture. Mon corps l’a mémorisée comme un signal brutal : "ça va commencer ! Il faut sortir ! Maintenant !" Pas de transition... Juste une poussée artificielle, chimique, imposée. Je n’étais pas prête, et je crois que je me suis dissociée avant même d’arriver. Comme si une partie de moi avait quitté mon corps pour ne pas vivre ce qui allait suivre. Et quand je suis née, j’ai hurlé tellement fort que le médecin s’est bouché les oreilles ! C’est ainsi que je suis entrée dans le monde, dans la terreur et dans la rage.
Longtemps, j’ai cru que mes difficultés à rester en lien venaient de mon histoire familiale. Mais en travaillant avec le corps, j’ai senti une vérité plus ancienne : Chaque fois que l’ocytocine revient dans un moment de tendresse, de confiance, de fusion, mon système se rétracte. Il ne sait pas recevoir. Il anticipe une urgence. Il associe l’amour à la rupture. Et cette empreinte-là, je la retrouve chez tant de personnes nées par déclenchement : un élan vers l’autre, suivi d’un retrait réflexe. Une panique face à la douceur. Comme si quelque chose en eux disait encore : ne t’abandonne pas, tu vas être arraché. Leur système nerveux semble figé dans un état d’effondrement dorsal, une forme de repli profond. Ces personnes ont du mal à faire confiance à la lenteur, au rythme organique des choses, et peinent à goûter une joie simple, stable, incarnée. Il y a un véritable besoin d’apprivoiser la douceur et de ressentir une sécurité dans le corps.
LA NAISSANCE PRÉMATURÉE
Les bébés prématurés naissent avec un système nerveux encore en pleine maturation, brutalement exposé à un monde extérieur pour lequel ils ne sont pas prêts.
Le sentiment de séparation, d’insécurité ou de désorientation peut devenir un fil rouge dans la construction identitaire. Stanislav Grof a observé, dans ses travaux sur les matrices périnatales, que les expériences de naissance difficiles, particulièrement celles qui interrompent prématurément le lien océanique avec la mère, peuvent marquer l’être d’une empreinte existentielle de solitude ou d’exil.
Bernard Montaud, fondateur de la psychanalyse corporelle, parle lui aussi du traumatisme de la naissance comme d’un événement fondateur de la psyché. Dans L’accompagnement de la naissance (Éditions Edit’as, 1997), il décrit sept étapes corporelles que l’enfant traverse lors de sa venue au monde, dont certaines peuvent rester « en suspens » si la naissance est précipitée. Il évoque notamment les cas de prématurité, dans lesquels l’enfant est emporté dans le processus sans avoir eu le temps de décider, dans son intériorité, de « naître ». Ce vécu laisse des traces profondes dans le rapport au choix, à l’incarnation et à l’engagement envers la vie.
Et pourtant, chez certains enfants prématurés, cette extrême vulnérabilité ouvre aussi un canal subtil. Le système nerveux, non encore consolidé par les couches de défenses habituelles, peut rester perméable aux réalités invisibles. J’ai un ami né trois mois avant terme dont la clairvoyance s’est manifestée très tôt : il perçoit les champs émotionnels, les mouvements énergétiques, et ressent instantanément ce qui n’est pas exprimé verbalement. Comme si l’interruption prématurée du voile intra-utérin avait laissé un accès direct aux mondes subtils.
D’un point de vue astrologique, il n’est pas rare que ces enfants aient une forte dominante neptunienne : Neptune à l’ascendant ou en fond du ciel, Soleil ou Lune en Poissons, ou des planètes en maison XII. Cette configuration témoigne d’une âme poreuse, sensible à l’invisible, souvent en quête d’unification. Mais ce don peut aussi s’accompagner d’un sentiment d’errance, de confusion ou de dissolution du moi si aucun contenant suffisamment sécurisant n’est proposé.
C’est pourquoi l’accompagnement de ces enfants (et des adultes qu’ils deviennent) nécessite une extrême douceur : ostéopathie crânienne, rituels de réintégration du corps, et travail sur les mémoires périnatales. Il s’agit de restaurer un sentiment de continuité d’être, tout en honorant la sensibilité unique de ces âmes venues trop tôt, ou peut-être venues tôt exprès pour ouvrir un passage entre les mondes.
L’ÉPISIOTOMIE ET LES TOUCHERS VAGINAUX
Il y a des gestes médicaux qui, bien qu’habituels, laissent des traces profondes. L’épisiotomie en fait partie. Souvent banalisée, elle consiste à inciser le périnée pour faciliter l’expulsion du bébé, notamment en cas d’urgence ou lorsque le temps semble manquer. Mais ce geste, même pratiqué avec soin, ouvre une zone sacrée du corps sans que le rythme naturel ait été respecté.
Le périnée marque la frontière entre l’intérieur et l’extérieur, entre la gestation et l’émergence. Quand il est incisé, ce passage devient une ouverture forcée, une séparation précipitée. Pour le bébé, cela peut être perçu comme une rupture soudaine, une sortie non accompagnée, une intrusion dans l’élan de naissance. Plus tard, certains enfants devenus adultes ont du mal à franchir les étapes lentement. Ils réagissent avec excès dans les moments d’intensité : soit en fusionnant, soit en coupant brutalement le lien. Ils ont parfois du mal à rester présents au cœur du mouvement, à accueillir la montée d’une émotion sans fuir ou se dissoudre. Pour la mère, l’épisiotomie peut laisser des douleurs persistantes, une dissociation de la zone périnéale, une difficulté à ressentir du plaisir ou à se réapproprier son bassin. Le périnée, intimement lié à la sécurité, à l’identité corporelle et au sentiment d’ancrage, peut garder en mémoire cette intrusion. Des mémoires d’invasion, d’impuissance ou d’accélération peuvent s’y loger, parfois longtemps après la naissance. La réparation passe souvent par un travail délicat : Ostéopathie, massage, soins énergétiques, thérapie cranio-sacrée, ou simplement des mots posés là où le corps n’a pas pu dire. Et il en va de même pour un autre geste souvent sous-estimé, mais tout aussi marquant : les touchers vaginaux pratiqués sans conscience du rythme du corps.
LES MATRICES PÉRINATALES DE GROF : UNE CARTOGRAPHIE PSYCHOSPIRITUELLE DE LA NAISSANCE
Le psychiatre tchèque Stanislav Grof, pionnier de la psychologie transpersonnelle, a consacré une grande partie de son œuvre à explorer l’impact de la naissance sur la psyché humaine. À travers ses recherches cliniques et ses travaux en états modifiés de conscience, il a mis en lumière ce qu’il appelle les matrices périnatales fondamentales : une cartographie en quatre temps de l’expérience de la naissance, vécue à la fois dans le corps, l’inconscient et l’âme. Il a co-créé, avec Christina Grof, la respiration holotropique, une méthode puissante d’exploration en état modifié de conscience permettant d’intégrer ces couches périnatales
1. La première matrice correspond à la vie intra-utérine harmonieuse. C’est une période de symbiose totale avec le Tout, un état d’union océanique. Mais si cette phase est traversée sous le signe du stress maternel, du rejet de la grossesse ou d’un environnement menaçant, elle peut laisser une empreinte de méfiance envers l’existence elle-même.
2. La deuxième matrice débute avec les premières contractions, alors qu’aucune issue n’est encore perceptible. Le bébé ressent l’utérus se resserrer autour de lui. Si cette phase reste enkystée dans le corps, elle peut entraîner plus tard un rapport difficile à la contrainte, une anxiété face au temps, une impression d’enfermement ou d’impuissance.
3. La troisième matrice est celle de la traversée du canal vaginal. C’est le moment de la lutte vers la vie, de la confrontation avec la pression, l’intensité, le passage étroit. Si cette étape est contournée, comme dans le cas d’une césarienne, il peut rester une sensation d’avoir été projeté dans l’existence sans l’avoir choisie, ou une difficulté à traverser les épreuves par soi-même.
4. La quatrième matrice est celle de la naissance proprement dite, vécue comme une libération, une percée vers la lumière. Elle peut laisser une empreinte d’éveil et de joie, ou, si elle est marquée par un environnement brutal, se graver comme un choc existentiel.
Pour Grof, ces empreintes se réactivent souvent lors des grandes transitions de la vie : un deuil, une rencontre amoureuse, un changement de lieu ou de rôle, une maladie, une naissance. Elles peuvent aussi faire écho à des mémoires transgénérationnelles ou karmiques. C’est pourquoi les approches thérapeutiques purement mentales montrent leurs limites lorsqu’il s’agit de ces strates profondes. Guérir ces mémoires implique de passer par le corps et le souffle, par l’image, le ressenti, le symbole. C’est pourquoi, dans mon accompagnement, j’invite souvent à descendre sous les mots, à laisser le corps raconter l’histoire là où l’intellect ne peut plus suivre.
Référence : Stanislav Grof, La naissance, la mort et la transcendance dans la psychothérapie (Éditions du Rocher, 1995). Autres lectures : L’esprit holotropique, Quand l’impossible arrive, Psychologie du futur.
LA LUNE NATALE
En astrologie, la Lune natale éclaire notre manière d’aimer, de nous attacher, de réguler nos émotions. Elle raconte souvent notre propre naissance, ce que notre corps a ressenti, comment il s’est adapté, ce qu’il a dû bloquer.
Une Lune en Verseau peut refléter un détachement précoce, une rupture avec la mère, ou un environnement très cérébral. Une Lune en Scorpion peut porter des mémoires de naissance chargée, des liens fusionnels, des non-dits, voire des conflits émotionnels intenses. Les Lunes en Capricorne, Vierge ou Balance mal aspectées peuvent témoigner d’un climat exigeant, distant ou instable. Une Lune en Poissons, si elle est submergée, peut signaler une confusion entre les émotions de la mère et celles du bébé. Une Lune en Cancer, hypersensible à l’ambiance familiale, peut vivre une séparation précoce comme un arrachement.
Connaître sa Lune, c’est comprendre comment notre système nerveux a appris à chercher la sécurité et parfois, où il a dû la trahir.
EN RÉGULATION DU SYSTÈME NERVEUX
Le corps parle un langage que les mots ne peuvent pas toujours atteindre. Pour restaurer un sentiment de sécurité, il est souvent nécessaire de passer par le non-verbal, le toucher, le souffle, la lenteur.
1. Ostéopathie crânienne, thérapie cranio-sacrée et micro-kinésithérapie Ces approches douces permettent de recontacter les mémoires tissulaires de la naissance, actives dans la posture, la respiration ou les rythmes internes. Elles libèrent les chocs périnataux ou transgénérationnels restés figés dans les tissus, et restaurent un mouvement de vie organique.
2. Kinésiologie Par le test musculaire, elle dialogue avec la mémoire cellulaire. Elle aide à retrouver l’origine d’un stress archaïque et à intégrer une réponse juste, même lorsqu’aucun souvenir conscient n’est accessible.
3. Watsu et pratiques aquatiques Le Watsu, en eau chaude, recrée une matrice sensorielle de sécurité. Il offre une renaissance douce, un accueil enveloppant, qui peut corriger l’empreinte d’une naissance brutale ou absente de contact.
4. Approches inspirées de la théorie polyvagale Bercements, pressions douces, exercices de co-régulation… Ces gestes simples réactivent les racines du calme. Un bain chaud, un peau-à-peau, un bercement silencieux peuvent restaurer une sécurité archaïque.
EN TRAVAIL SYMBOLIQUE ET ÉNERGÉTIQUE
Certaines blessures ne se libèrent qu’en entrant dans le mythe, le souffle, le subtil. Voici quelques portes vers une intégration plus profonde :
1. Hypnose régressive et constellations familiales Elles permettent de revisiter sa naissance, de réparer des liens interrompus, de rendre visible l’invisible dans le champ périnatal.
2. Rebirthing, respiration holotropique, breathwork Ces pratiques modifient l’état de conscience et libèrent les mémoires périnatales. Stanislav Grof, qui a mis en lumière les matrices périnatales, a co-créé la respiration holotropique avec Christina Grof, pour permettre l’intégration de ces empreintes profondes.
3. Astrologie archétypale Observer la position de la Lune natale, du Nœud Sud, de Chiron ou de Cérès peut offrir une lecture subtile du vécu de l’âme à l’arrivée dans la matière.
4. Les remèdes homéopathiques agissent comme des clés vibratoires pour déverrouiller les empreintes anciennes :
Arnica montana : pour les chocs physiques ou énergétiques non intégrés.
Aconitum napellus : quand la naissance fut brutale, panique ou surgissement.
Opium : pour les états figés ou les sidérations profondes.
Ignatia amara : pour les séparations silencieuses et les deuils précoces.
Lac humanum / Lac maternum : quand le lien d’attachement ou d’accueil a été blessé dès le départ.
Ce sont des remèdes que j’utilise régulièrement en lien avec les récits de naissance corporels. Leur action est fine, profonde, parfois fulgurante.
5. Rituels symboliques Méditations guidées, rituels d’eau, offrandes posées sur le corps… Autant de façons d’honorer la mémoire cellulaire de notre venue au monde.
UNE PRÉCISION IMPORTANTE
Ce texte n’a pas pour but de culpabiliser les mères. Les césariennes, les péridurales, les déclenchements sont parfois nécessaires, et peuvent sauver des vies. Beaucoup de femmes ont fait de leur mieux dans un contexte médical, culturel et émotionnel souvent complexe.
Ce que je propose ici, c’est une autre grille de lecture. Une invitation à regarder avec douceur ce qui a pu s’inscrire très tôt, souvent en silence. Et surtout, à ouvrir des voies de reconnaissance, de réparation, de réconciliation. Comprendre ce que la naissance a inscrit en nous, ce n’est pas chercher des coupables ni se figer dans le passé, mais remettre du sens, retrouver une cohérence intérieure, et rétablir ce fil de confiance avec la vie. C’est aussi se donner la chance de générer de la joie autrement, à partir d’un lieu plus stable, plus habité, plus nourri.



